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Risque de dévaluation du franc CFA : la Beac tente de se rattraper après une bourde dans la communication

« Contrairement aux informations diffusées par certains médias, laissant croire à une possible dévaluation du franc CFA, l’évolution de la pandémie Covid-19 dans la zone d’émission n’a pas influencé négativement le niveau des réserves de change, qui demeure confortable », indique le gouverneur de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac) dans un communiqué rendu public ce 12 mai 2020.

A en croire Abbas Mahamat Tolli (photo), « au 10 mai 2020, les réserves de change de la Beac se situent à 5 348,8 milliards FCFA, représentant près de 5 mois d’importations de biens et services, pour un taux de couverture extérieure de la monnaie de 74,16% ».

Ce discours est aux antipodes de celui contenu dans le rapport de politique monétaire de mars. C’est ce document, rendu public le 27 avril dernier, qui a servi de base aux articles des médias indexés par le gouverneur de la Banque centrale.

« Le niveau des réserves de change de la zone est ressorti à 3,2 d’importations des biens et services à fin décembre 2019, soit un niveau à peine supérieur au seuil minimal de 3 mois d’importations des biens et services », constate la Beac dans ce document.

Bourde

«  Une propagation rapide et de grande ampleur de la crise du Covid-19 […] se traduirait par une réelle menace pour la stabilité extérieure de la monnaie, soulignant ainsi le fait qu’en l’absence d’ajustement budgétaire et de mobilisation conséquents des financements extérieurs, la Beac serait de nouveau soumise aux mêmes risques sur la parité de sa monnaie qu’en fin 2016 », prévient-elle, par la suite, dans ce rapport.

« Ce message subliminal sur la dévaluation est une grosse erreur de communication », avait confié, à Investir au Cameroun, un ancien cadre de la Beac, sollicité pour commenter le document. Au sein de l’institution d’émission, on avoue en effet que l’énoncé sur le risque sur la parité de la monnaie n’aurait pas dû se retrouver dans le rapport.

« Ça nous a échappé lors de la relecture », confesse une source interne. Le communiqué du gouverneur de ce 12 mai tend à le confirmer. Selon ses collaborateurs, Abbas Mahamat Tolli souhaite éviter que cette alerte n’alimente à nouveau les rumeurs sur la dévaluation du franc CFA.

« Ces rumeurs peuvent négativement affecter l’activité économique dans la Cemac [Communauté économique et monétaire des États de l’Afrique centrale, Ndlr] et amener les agents économiques et les investisseurs à reporter leurs décisions d’investissement ou à effectuer des sorties frauduleuses de devises  », s’est toujours inquiété le Tchadien depuis son arrivée à la tête de la banque centrale en février 2017.

Domaine réservé

En plus, la référence aux risques sur la parité contenue dans le rapport de politique monétaire du mois de mars est à rebours de la doctrine en zone Cemac. Cette communauté économique régionale a fait le choix de privilégier un ajustement budgétaire pour répondre aux chocs économiques.

Une option réaffirmée par les chefs d’Etat de la Cemac lors du sommet extraordinaire de décembre 2016, tenu à Yaoundé. Par ailleurs, Abbas Mahamat Tolli sait que les questions touchant à la modification de la parité entre le franc CFA et l’euro «  relèvent du pouvoir politique ». Il est donc malvenu pour la Beac de s’y aventurer, bien que sa mission soit de garantir la stabilité de la monnaie.

L’alinéa 2 de l’article 12 de la Convention de coopération monétaire entre les Etats de la Cemac et la France dispose, en effet, que la parité «  est susceptible d’être modifiée après concertation entre les Etats signataires, compte tenu des exigences de la situation économique et financière des Etats membres.

(Agence Ecofin)

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