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Réunion de l’Opep+ : Jusqu’où peut grimper le pétrole ?

Les treize membres de l’Opep, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole, menés par l’Arabie saoudite, et leurs dix partenaires, dont la Russie, se réunissent ce mercredi par visioconférence. Au menu de discussions, une éventuelle augmentation de la production pour empêcher le pétrole flamber.

Propulsés par l’invasion russe de l’Ukraine les cours ont grimpé à des niveaux inédits depuis 2014, dépassant le seuil symbolique de 100 dollars le baril.. L’Agence internationale de l’énergie a décidé de débloquer 60 millions de barils de pétrole des réserves d’urgence du monde entier dont la moitié (30 millions de barils) provenant des Etats-Unis, le tout pour rassurer les marchés. Que craignent les marchés ? Les opérateurs craignent que le pétrole ne vienne à manquer. Et le retrait de grandes banques russes du système interbancaire Swift ne fait qu’attiser ces craintes, estime Francis Perrin, chercheur associé au Policy Center for the New South à Rabat et directeur de recherche à l’IRIS.

« Swift, on dit souvent que c’est “l’arme atomique”. Je crois qu’il faut faire très attention à ce genre d’expression. Il y a d’autres solutions que Swift », explique l’expert. « Simplement il faut revenir au téléphone et au fax. C’est un peu plus compliqué. Donc, oui, ça peut avoir un impact. Ça peut rendre plus difficile le fait pour des entreprises russes exportant des matières premières, y compris du pétrole et du gaz naturel, d’être payées par leurs clients. Donc, ça peut être un élément qui vient s’ajouter à l’ensemble de sanctions économiques. Les sanctions déjà prises ou celles qui sont en train d’être prises pourraient effectivement perturber le commerce pétrolier et gazier mondial, entre la Russie et l’Europe. »

Produire plus, pas si simple
Face à ce contexte difficile, que comptent faire les pays de l’Opep+ ? Depuis l’été 2021, ils ont décidé d’ouvrir progressivement des vannes pour accompagner la reprise économique. Mais le résultat est très loin de la hausse convenue de 400 000 barils par jour de plus chaque mois. Faute d’investissement, principalement. À cause de l’instabilité politique ou encre à cause du Covid-19, certains États, comme le Nigeria ou l’Angola n’ont pas pu moderniser leurs infrastructures.

« Tous les pays ne peuvent pas produire plus », observe Francis Perrin. « Tout le monde va donc se tourner vers l’Arabie saoudite, premier exportateur mondial de pétrole et les Émirats arabes unis. Ces pays qui sont très proches de Washington feront évidemment l’objet de pressions amicales, ça a déjà commencé. Qu’est-ce que ces pays vont décider ? Il faut une décision à l’unanimité. Et il y a la Russie dans les vingt-trois. Donc, ce sera une réunion un petit peu compliquée. On s’attend de toute façon qu’au minimum ils visent plus 400 000 barils par jour en avril. Mais pour les pays occidentaux, ce ne serait pas suffisant », estime l’expert.

Des pays producteurs devront sans doute fournir plus de pétrole. Mais pour cela, ils devront peut-être compter avec l’Iran, qui produit en ce moment en deçà de ses capacités. Si les négociateurs réunis à Vienne arrivaient à une entente pour sauver l’accord sur le nucléaire iranien, cela permettrait de débloquer 800 000 barils de pétrole supplémentaires par jour. Cela permettrait de baisser les prix, sans doute, mais pas de beaucoup.

Une hausse durable de l’or noir
À long terme, nous devrions probablement nous habituer à payer plus cher l’ensemble des énergies utilisées, estime Thierry Bros, professeur à Sciences-Po et spécialiste des questions énergétiques : « Que ce soit le pétrole, que ce soit le gaz, que ce soit l’électricité, on le voit bien sur les programmes nucléaires… La demande énergétique n’ayant pas baissé, nous sommes obligés de relancer un très grand programme mondial pour produire plus d’énergie. Avec, en plus, cette crise militaire qui arrive, il y des choses bien plus graves. Si les exportations de pétrole, gaz, charbon russe sont impactées, le prix du pétrole va fortement augmenter. »

Une hausse potentiellement durable, donc, et qui viendrait exacerber des pressions inflationnistes : « On a oublié que le pétrole était le produit essentiel, pas seulement pour l’énergie, mais aussi pour produire des engrais. Vous allez donc avoir tous les prix de l’agroalimentaire qui vont aussi être plus élevés. On est, à mon avis, qu’au début de ce cercle vicieux de l’inflation. La première partie, celle qu’on a vue en ce moment, c’est de l’inflation liée à la reprise économique et aux matières premières énergétiques. On va avoir un deuxième cycle, l’inflation des matières premières énergétiques qui va perdurer, et ensuite on aura l’inflation des matières premières agricoles »,conclut l’expert.

La hausse de l’or noir pourrait favoriser un passage vers d’autres énergies. Mais cela coûterait cher aux pays dont la principale source de revenus vient du pétrole.

(RFI)

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