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Rapport – Evaluation de la réforme de l’hydraulique rurale : Les réserves du gouvernement

En Conseil des ministres mercredi dernier, le ministre Serigne Mbaye Thiam a présenté l’évaluation de la réforme sur l’hydraulique rurale. Démarrée depuis la création de l’Office des forages ruraux en 2014, la réforme sur l’hydraulique rurale qui concerne plus de 8 millions de personnes, est peu satisfaisante en termes de performances, déplore le rapport de la mission d’évaluation commanditée par le gouvernement.

Avant-hier, en Conseil des ministres, le ministre de l’Eau et de l’assainissement, Serigne Mbaye Thiam, a fait une communication sur l’évaluation de la réforme sur l’hydraulique rurale. Le Quotidien a parcouru ce rapport provisoire, qui n’est pas encore rendu public. La mission d’évaluation a conclu que «l’appréciation des résultats, des performances de l’Office des forages ruraux (Ofor) et des délégataires et de la qualité de service est globalement peu satisfaisante». Créé en 2014, l’Ofor a depuis, entamé une professionnalisation de la gestion du sous-secteur de l’hydraulique rurale. Pour cette réforme qui concerne 8 millions 178 mille 859 personnes à servir l’eau potable, le périmètre Notto-Ndiosmone-Palmarin &Gorom Lampsar (Ndp-Gl), avec 4 forages à gros débit et 13 unités de potabilisation et de traitement (Upt), a été attribué à Société d’exploitation d’ouvrages hydrauliques (Seoh), depuis juillet 2015.

15% des forages sous affermage
Les zones rurales de Thiès et Diourbel, avec 265 Systèmes d’approvisionnement en eau potable (Saep), ont été confiées à Aquatech avec un démarrage effectif depuis avril 2018. Les régions Kaolack-Kaffrine avec 294 Saep sont gérées par Flexeau qui a démarré ses activités en mars 2019. La gestion de l’eau potable de Tam­bacounda (227 Saep) est au compte de la Société de gestion des eaux du Sénégal (Soges), en activité depuis octobre 2018. Les résultats sont mitigés parce que, selon la mission d’évaluation, sur les 1989 Systèmes d’approvisionnement en eau potable, (constitués de 2065 forages et de 57 Unités de potabilisation et de traitement), 312 seulement sont sous Dsp, soit 15% des Saep.
Dans les zones sous Dsp, la moitié des Saep n’est pas encore intégrée au périmètre d’affermage. «Les principales con­traintes pour Ofor sont en rapport avec la disponibilité des ressources financières qui doivent permettre la réalisation de nouveaux ouvrages et la remise en état des ouvrages existants. Ces contraintes et celles liées au statut de de Ofor ont probablement contribué au retard constaté dans la mise en place des Dsp, qui devait être achevée en 2017 et qui est encore à 50 % d’exécution (4 Dsp sur 8). Cette situation impacte fortement les projections ba­sées sur la perception des redevances», ont décelé les enquêteurs.
Dans une enquête menée dans les régions de Thiès, Diourbel, Fatick, Kaolack et Kaffrine, Le Quotidien révélait le 28 août dernier que la réforme était loin de ses objectifs. «Si la pertinence de la réforme est globalement appréciée, des mesures d’amélioration sont suggérées pour une meilleure appropriation. Une perception négative est maintenue et exacerbée par les échanges entre Asufor (Association de gestion des forages ruraux) et certains délégataires, l’influence des réseaux sociaux dans le relais et la transmission de l’information émanant des périmètres Dsp fonctionnels et des localités réticentes, la faible présence sur le terrain et la communication encore insuffisante de l’Ofor et des services techniques», a relevé le rapport.

«Grille tarifaire à réviser»
A Thiès et Diourbel, des collectifs de jeunes se sont emparés de la gestion de l’eau et ont déclaré la guerre au Délégataire du service public (Dsp) de l’eau potable en milieu rural. «Ces fortes réticentes constatées, dans les périmètres délégués et les zones hors Dsp, s’expliquent par les performances techniques médiocres de certains opérateurs, notamment au démarrage de l’exploitation, avec les pannes récurrentes et les longs délais de rupture de service», ont souligné les évaluateurs. Ces derniers ont appelé l’Etat à faire des «efforts conséquents» à travers des «ajustements tarifaires et une harmonisation très bénéfique à certaines catégories d’usagers». Cependant, signaleront-ils, «la rigueur mise dans les relevés des compteurs (remis à niveau) ont occasionné une hausse des montants facturés, que les usagers imputent à tort à la grille tarifaire».
Il faut rappeler que le prix du mètre cube a été fixé par arrêté interministériel : 250 francs Cfa pour les abonnés domestiques, 200 francs Cfa pour les activités maraîchères et 200 francs Cfa pour les abreuvoirs. «La grille tarifaire est à réviser pour tenir compte des habitudes de consommation réellement constatées, en étudiant la possibilité d’adopter une tranche sociale alignée sur le tarif urbain, et une tranche pleine proche de la tarification moyenne en vigueur avant l’entrée en service des Dsp, de façon à relever le niveau du prix moyen assurant ainsi des revenus supplémentaires et durables à l’Ofor», a invité la mission d’évaluation. Cette dernière a appelé à une déconcentration progressive avec une responsabilisation des cinq catégories d’acteurs concernées (administration et collectivités territoriales, services techniques déconcentrés, usagers, Ofor et opérateurs privés), une «réelle priorité».
Les évaluateurs de la réforme ont plaidé pour des «mesures hardies» de renforcement des capacités financières de l’Ofor et de rentabilisation des Dsp. «Celles-ci passeraient, pour les opérateurs privés, par une structuration des périmètres et des mesures en vue de relever le niveau d’incorporation des Saep», indique-t-on. Chez les Dsp, des disparités existent avec le constat d’une meilleure qualité de service et des bonnes performances de Seoh. «Cette appréciation par opérateur est à nuancer en tenant compte de la spécificité des systèmes par périmètre (grand réseau, Saep de plus ou moins grande taille, unités de potabilisation), de la durée d’exploitation (6 ans pour Seoh et 3 ans au maximum pour les autres opérateurs), de la vétusté des ouvrages et équipements (le système NDP étant plus récent) et des efforts de remise en état déployés à l’entrée en service des Dsp», a constaté l’étude.

L’option Dsp est garante si…
Pour les évaluateurs, l’approche délégation, une option de l’Etat, doit être maintenue pour certaines catégories d’acteurs, compte tenu des faibles performances notées dans les périmètres à faibles taux d’incorporation (cas de Diourbel-Thiès). «Les performances en nette amélioration du périmètre Kaolack/Kaffrine confirment la pertinence d’une délégation à une échelle plus large», écrivent-ils. D’après eux, cette option est «garante, moyennant un contrôle efficace de l’exploitation et du patrimoine, de la sauvegarde du patrimoine, dans le respect des engagements contractuels de l’Etat, de l’Ofor et des délégataires».
Pour cela, le rapport a souligné la nécessité de poursuivre le renforcement du cadre institutionnel et juridique «avec une responsabilisation accrue de l’Ofor, notamment dans ses missions de gestion du patrimoine, d’exercice du service public de l’eau potable et de contrôle de l’exploitation et l’harmonisation des mécanismes de représentation des usagers et de gestion transitoire». Dans ce cas, il est indiqué qu’un toilettage des textes permettra de décider du statut final et des rôles des Asufor dans le nouveau cadre institutionnel.

(LEQUOTIDIEN)

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