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Puits de sel : L’or blanc de Soum encore sous exploité

Soum est une commune du département de Foundiougne, dans la région de Fatick. Ici, le sel constitue une ressource très prisée et exploitée par les populations, depuis plusieurs années. Mais aujourd’hui, la commercialisation de « l’or blanc » ne nourrit plus son homme. Découverte.

 Le site est appelé : « Thiémca » en sérère (lieu où est extrait le sel). Il est situé à la façade ouest de la commune de Soum (département de Foundiougne). Vers le littoral, beaucoup de puits ont été forés par les exploitants pour trouver ce qu’il est convenu d’appeler « l’or blanc » de Soum. « Depuis plusieurs années, ce produit est exploité ici de manière traditionnelle et artificielle », explique Abdoulaye Bop Diakham, président de la coopérative des exploitants de sel. Il est lui-même un acteur chevronné qui partage avec les autres membres de sa famille les puits légués par leurs grands-parents.

Le potentiel salicole de Soum est énorme et est qualifié de meilleure qualité, contrairement au sel tiré des marais salants dans d’autres zones de la région de Fatick. « Lorsqu’on était encore plus jeune, on rencontrait les mamans de Soum qui venaient tous les matins à Foundiougne. Avec des bassines remplies de sel portées sur la tête, elles écoulaient leurs produits, soit au marché ou dans les maisons avec le porte-à-porte », raconte Issa Ba, un enseignant chargé du volet alphabétisation à l’Inspection de l’éducation et de la formation (Ief). Selon lui, ces femmes faisaient près de 5 km de piste pour rallier Foundiougne.

Une méthode tout à fait traditionnelle que plusieurs générations de femmes de Soum ont vécue, à l’époque. Une illustration parfaite, selon Issa Ba, de la bravoure des femmes de Soum qui faisaient presque le tour de la commune de Foundiougne, avec tout le poids qu’elles portaient, pour vendre du sel. « Mais aujourd’hui, en ma qualité d’enseignant et d’élu départemental, j’ai envie de les voir dans des conditions meilleures », fait savoir M. Bâ qui souhaite que le produit puisse être écoulé au marché ou dans un centre commercial.

L’exploitation du sel est un processus bien huilé. « Après le creusement du puits pour obtenir une quantité d’eau salée, c’est là qu’on commence à constater l’évaporation du produit. Et, au fil du temps, le sel se forme en quantité à l’intérieur », explique  Abdoulaye Bop Diakham, président de la coopérative des exploitants de sel de Soum.

Par la suite, des paniers traditionnels sont utilisés par les femmes qui descendent à l’intérieur pour extraire le sel. Le produit est conditionné dans des sacs de 25kg ou 50 kg, destinés à la commercialisation.

Les femmes en première ligne

« Même si les puits sont creusés par les hommes, les femmes s’occupent de l’extraction, de la mise en sachets et de la commercialisation», explique Fatou Ndong, présidente du Groupement des femmes « Wagg Bassil » (savoir gérer le foyer). Mme Ndong dit avoir hérité de son grand père, Laïty Ndong, en 2009, le puits qu’elle exploite actuellement. « Pour l’extraction du sel, cette activité relève spécifiquement des femmes qui forment des groupes de 6 à 10. Elles lavent le sel avec le reste de la saumure totalement saturée, puis regroupent la production sous forme de tas imposants près des puits ».

Ici, un puits peut contenir jusqu’à 7 sacs de 50 kg de sel qui sont transportés par la suite par charrette jusqu’à l’unité de transformation. «Les femmes éprouvent beaucoup de difficultés dans l’exercice de leur activité. Cela, du fait d’un manque d’organisation, mais surtout du manque d’équipements en matériels (gants, bottes, masques et lunettes) nécessaires pour une meilleure exploitation et pour la sécurité dans les puits », relève la présidente du groupement des femmes

Quand le sel ne nourrit plus les exploitants

Le vieux El hadji Lamine Bop, qui dispose de 3 puits, depuis des années, avec des fortunes diverses, raconte « qu’il fut un temps où le sel était bien prisé. On parvenait à céder beaucoup de quantités à des revendeurs qui venaient de partout. Des saisonniers venaient de certains villages comme Diouroup, dans le département de Fatick, pour contribuer à la main d’œuvre locale particulièrement le forage des puits en contrepartie d’un paiement compris entre 15.000 et 20.000 FCfa, à l’époque arrêté d’accord partie. Maintenant, la situation actuelle a complètement changé. Même le prix de vente a chuté puisque le sac de 100 kg qui était cédé à 3000 FCfa ne coûte plus que 1500 FCfa. Nous avions même des clients qui venaient de la Gambie et l’on recevait des touristes qui venaient visiter le site ».

Ainsi, conscients de toutes ces difficultés, les exploitants ont mis récemment en place une coopérative pour mieux prendre en charge les destinées de l’exploitation du sel de Soum considéré d’ailleurs comme étant de meilleure qualité. Le label «Sel de Soum » est en gestation, selon Abdoulaye Bop Diakham. À son avis, la mise en place de la coopérative regroupant tous les acteurs du sel de la commune de Soum va favoriser une meilleure organisation et une meilleure exploitation pour répondre aux normes allant de l’exploitation, au conditionnement jusqu’à la transformation en sel iodé, l’hygiène et la mise en sachets. « Cela devrait nous ouvrir les portes des marchés nationaux, sous régionaux et internationaux pour une bonne commercialisation du produit. Il convient également de faire en sorte que le site soit plus accessible et qu’un prix harmonisé soit arrêté pour être bénéfique à tous ».

Dans la perspective d’organisation de la production du sel, le conseil départemental de Foundiougne, en collaboration avec la mairie de Soum, envisage d’accompagner la coopérative à accéder aux financements. Mais surtout dans la commercialisation à travers les foires nationales, sous régionales et départementales. Surtout que cette commercialisation, selon M. Diakham, « se passe par le biais des intermédiaires qui viennent acheter le sel pour le revendre ».

Un attrait touristique à revaloriser

Soum a été l’un des trois gros villages du Sénégal avec Thionck-Essyl et Dioffior,  à avoir été érigé en commune en même temps en 2008. Le village qui fait partie des autres localités comme Ndorong, Thiaré et Mbassis, avec sa population d’environ 15.000 habitants, est aussi riche de ses traditions et de sa culture. Il a été fondé par Mbappa Youngar Sarr. Avec une identité forte et attirante par son histoire fascinante. La paix et la prospérité ont, depuis longtemps, fait la particularité de Soum qui s’est toujours distinguée sur les plans économique, politique, socioculturel et démographique.

Sur le plan économique, sa forte production de riz, de coton et de sel, mais aussi son dynamisme sur le plan commercial avec des fruits comme la mangue, les produits halieutiques, entre autres, ont longtemps fait de Soum une sorte de capitale économique du « Loog ».

 «Dans notre programme de tourisme de découverte, Soum constituait, pour nos clients touristes, une étape importante », souligne Famara Diémé, un promoteur touristique à Foundiougne. Une fascination exaltée, selon lui, « par la vitalité d’un patrimoine culturel » qui traverse les époques, mais aussi et surtout par le site des puits de sel et les greniers familiaux qui constituaient une attraction pour les visiteurs.

Aujourd’hui, Famara Diamé souhaite revoir ce patrimoine qui faisait la fierté des populations, surtout le grenier familial qui servait de magasin de stockage des produits agricoles et salicoles. « Cela permettait de sécuriser toute la production contre une éventuelle catastrophe (incendie, inondations) », souligne-t-il.

Pour revenir au sel, il constitue un  riche potentiel sous-exploité. Le produit, très fin et de bonne qualité, a besoin d’être boosté pour sa meilleure valorisation afin de permettre à Soum de mieux affirmer sa vocation culturelle et économique.

Pour autant, il convient de résoudre l’équation de l’accès à cette localité reliée par une piste dénommée « Boucle du Loog », à partir de Foundiougne jusqu’à Mbam, en passant par Soum, Ndorong et Mbassis, longue de 17,7km. Une doléance pressante portée par le maire Moustapha Ngor Léon Diop qui souligne « la nécessité, voire l’urgence d’achever les travaux qui ont été entamés en 2013 et arrêtés en septembre 2014 ».

Selon l’édile de la commune, les populations attendent toujours le redémarrage des travaux de cette Boucle du Loog qui constitue, pour les habitants, la route de l’espoir. Le maire de Soum, Moustapha Ngor Léon Diop, souligne qu’en matière d’infrastructures routières, sa commune n’est pas bien lotie. « Et cette route constituait un espoir pour les populations, ce qui aurait permis l’évacuation et l’écoulement, sans difficulté, des produits que nous exploitons ici, à l’image du sel naturellement, mais aussi du riz et des autres produits agricoles, fruitiers et halieutiques, vers les autres localités du Loog et ailleurs ».

PONT, EAU POTABLE….

Ces autres urgences

La construction du pont qui relie Soum à l’Ile de Baout, dans la commune de Djirnda, constitue une doléance des populations des deux communes. Cet ouvrage, qui avait été édifié en 1984 par  Caritas, avec un premier prototype, est aujourd’hui totalement dégradé. Sa reconstruction va beaucoup faciliter l’ouverture vers les îles du Saloum.  Selon le maire, cela permettrait, en même temps, de désenclaver trois villages dont Baout, Rofangué et Vélingara et faciliterait l’accès des véhicules jusqu’à ces îles. Mais le projet est toujours à l’état, en attendant le bout du tunnel. « Nous avons espoir qu’avec le Pacasen rural, cette doléance sera satisfaite. Tout comme l’alimentation en eau potable à travers le raccordement de Soum à l’île de Baout qui dispose d’un réseau grâce au projet Notto-Ndiosmone-Palmarin ou de manière provisoire à Foundiougne avant le raccordement définitif à Baout qui est à 6 km de Soum », argue le maire.

(LESOLEIL)

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