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Prix : Le vrai combat est dans le pouvoir d’achat

L’image est frappante, au propre comme au figuré. Les réseaux sociaux affichent des graphiques qui montrent comment des produits de première nécessité, comme le pain, le sucre, l’huile, le riz ou le savon, ont connu une importante hausse entre 2019 et maintenant. La grogne monte au sein de la population, où l’Etat est mis à l’index.

Le gouvernement du Sénégal, dont le Président au moment de sa prise de pouvoir en 2012, avait fait de la lutte contre la cherté de la vie un de ses combats essentiels, est aujourd’hui en train de s’empêtrer dans un combat pour permettre à certaines de ces denrées de première nécessité de retrouver un niveau de prix moins prohibitif. Mais pour ce faire, l’Etat n’a trouvé comme solution actuelle, que de se vider d’une importante partie de ses ressources financières, sans que cela n’ait d’impact sur la courbe des prix ou les conditions de vie des populations, en particulier, sur les couches les plus pauvres.
Tout le monde le dit depuis un certain temps. La pandémie du Covid-19, en perturbant les échanges commerciaux, a cassé la chaîne logistique internationale et précipité la rareté de certains produits qui se sont retrouvés convoyés vers des destinations moins onéreuses. On en est arrivés à des situations où la demande ne rencontre pas d’offre substantielle sur le marché.
Le Sénégal ne produit quasiment rien de ce qu’il consomme. Même notre production en sucre n’est pas encore assez importante pour couvrir notre niveau de consommation. Le pays est donc fortement tributaire du marché international. Les présidents Wade et Macky Sall ont voulu, à leur manière, inverser les choses en encourageant la production locale. La Goana en 2008, le Pracas et autres programmes d’incitation à la production agricole locale, ont absorbé plusieurs milliards de francs, pour des résultats plus que mitigés. Les ministres de l’Agriculture de Macky Sall se sont plus distingués pour leurs capacités à vouloir vendre des chiffres de production faramineux de l’arachide et du riz, que par la mise à disposition des consommateurs de produits agricoles locaux. Les conséquences en sont les hausses des prix des produits venant de l’étranger, qui vont continuer à augmenter. Et les Sénégalais ne devraient pas imaginer être les seuls dans la sous-région à être affectés.
C’est dire que l’Etat a pour devoir de veiller à ce que la farine de blé, le sucre ou le riz défiscalisés, ne se retrouvent pas de l’autre côté de nos frontières, pour le bénéfice des consommateurs d’autres pays. Et même quand ces produits ne franchissent pas les frontières, les services de contrôle des prix ne sont pas assez efficaces pour vérifier que le consommateur bénéficie de l’impact des efforts fournis par les pouvoirs publics.
Dès lors, au lieu de se battre pour tirer les prix vers le bas, ne serait-il pas plus efficace d’améliorer le pouvoir d’achat des citoyens ? Et surtout, faire en sorte qu’une bonne partie de gens soient en mesure de se prendre en charge elles-mêmes. Autrement, à quoi servirait-il de vendre le kilo de pain à 150 francs si beaucoup de gens n’ont pas de revenus leur permettant de s’offrir ce pain ? C’est cela qui doit être le vrai combat, l’amélioration du pouvoir d’achat. Renoncer à des taxes ou ponctionner les revenus de l’Etat pour tirer les prix vers le bas ne réglera jamais les problèmes de l’inflation. On bloque la compétitivité des producteurs locaux et on favorise les spéculateurs, sans que les citoyens n’en bénéficient. Les considérations politiques ne doivent pas freiner indéfiniment les bonnes décisions économiques.

(LEQUOTIDIEN)

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