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Marché au poisson de Pikine : Le nano crédit libère les femmes de l’usure

Le nano crédit est un système de prêt express de montants compris entre 10 000 et 300 000 FCfa, avec un taux de remboursement de 5 %. Un an après son introduction au Marché central au poisson de Pikine, cette innovation a révolutionné la vie des mareyeuses, des vendeuses de poissons et des femmes transformatrices, permettant ainsi à certaines de doubler leurs bénéfices.

Du monde, du bruit et d’intenses activités de commerce et de business. C’est l’ambiance habituelle au Marché central au poisson de Pikine. Ce lundi matin n’a pas dérogé à la règle. Sous l’ombre des tentes, des femmes aux boubous submergés d’écailles exposent diverses catégories de poissons. « Pélagiques, thons noirs, rougets, etc. Des produits frais pour toutes les bourses », chantonne une dame d’une quarantaine d’années. De la même tranche d’âge, Kéwé Diagne a une autre préoccupation. En chemise verte et pantalon noir, des billets de 10 000 FCfa entre les doigts, elle franchit le portail du point nano crédit sur lequel est inscrit en moyens caractères : « À vos côtés où que vous soyez ». Elle se met en face de l’agent de crédit. Toute gaie, elle procède au remboursement d’une tranche de son crédit. De 50 000 FCfa au début, la vendeuse de poissons a franchi un palier pour en arriver à 125 000 FCfa. « Au bout d’un mois, je rembourse mon prêt. Une partie du bénéfice est réinvestie pour acheter plus de caisses de poissons », explique Kéwé.

Un seau rempli de pélagiques à côté d’une machine, Ndèye Diom moud le poisson. Son activité a pris de l’élan avec le nano crédit. D’un premier fonds initial de 10 000 FCfa, la dame en est, aujourd’hui, à 125 000 ; ce qui, dit-elle, relève son chiffre d’affaires. « Plus on achète de produits, plus on gagne. En investissant 125 000FCfa, je peux, au bout d’un mois, avoir un bénéfice à peu près égal au capital. Ainsi, je parviens à subvenir à mes besoins familiaux et à injecter plus de fonds tout en étant à jour avec la caisse », sourit-elle.

Des débuts prometteurs 

Sa table bien garnie de pélagiques et de capitaines, appelés « beurres » au Sénégal, le tablier noir au-dessus d’une robe, Ndèye Guèye agite son chasse-mouches pour écarter les insectes. Ses débuts dans la vente de poissons datent de plusieurs décennies. Son investissement était le fruit d’un partenariat avec « Boy Poulo », à travers des prêts remboursés tous les soirs avec un surplus de 30 %. « C’était difficile, je peinais à faire des bénéfices », se remémore-t-elle. Sereine, elle évalue l’apport du nano crédit. Débutant avec un prêt de 50 000 FCfa, elle a franchi le palier lui permettant de travailler désormais avec un fonds de 250 000 FCfa. « Passer d’un délai de paiement de 12 heures à 30 jours, nous permet de souffler. À ce rythme, il est possible de sécuriser son versement et de rentrer, tous les jours, avec plus de 10 000 FCfa de bénéfices », se réjouit-elle.

Des sachets de poissons moulus rangés dans un seau, Maguette Sène a construit sa vie autour de la vente de poissons. Entre Yarakh et Pikine, elle est à la recherche de gains. C’est d’ailleurs grâce à ce métier qu’elle a aidé un de ses fils à aller étudier en Europe. Dans un contexte où les ressources halieutiques se font rares, elle applaudit le nano crédit. « On empruntait à nos voisins pour satisfaire au versement quotidien des bailleurs. Avec ce système, on est autonome, on travaille, paie à son rythme et investit même une partie du bénéfice pour booster son activité. Avec un prêt de 150 000 FCfa, on peut se retrouver, à l’heure, avec près du double », souligne-t-elle, assise sur un seau, les pieds enfouis dans un tas d’écailles de poissons.

Porter le délai de remboursement à 3 mois 

Le nano crédit a redonné de l’élan à l’activité d’Ouly Ndiaye. Comme l’appétit vient en mangeant, elle rêve de l’extension de l’enveloppe à 500 000 FCfa pour que les femmes puissent s’épanouir davantage. « Le nano crédit nous a libéré des chaînes de l’usure. Nous sommes plus à l’aise avec ce système. Cependant, nous aimerions avoir des sommes plus importantes avec un délai de remboursement de trois mois. Cela permettra d’être plus compétitives », préconise-t-elle. Ndèye Ndim allie gratitude et doléances. À côté du bonheur de se faire des bénéfices de près de 10 000 FCfa, elle sollicite l’augmentation du délai de remboursement des crédits. À l’en croire, le remboursement étalé sur trois mois serait la bonne trouvaille. « Certes, on ne peut pas avoir mieux que le nano crédit, mais payer en trois mois nous permettrait de constituer notre propre capital. Un mois, c’est trop juste », considère-t-elle. Une position partagée par Magatte Sène. Cette dernière souhaite bénéficier d’un crédit d’un million de FCfa, voire plus, pour transformer, emballer, puis exporter ses produits. « Nos produits sont très prisés. Le nano crédit nous a sauvées de l’usure. La prochaine étape devrait être des enveloppes qui dépassent le million pour favoriser l’exportation des produits locaux », espère Magatte.

Demba DIENG 

Le délai de remboursement sera étalé sur trois mois 

La rallonge du délai de remboursement à trois mois est une doléance qui sera bientôt satisfaite. C’est l’assurance de l’agent de caisse du point nano crédit du Marché central au poisson de Pikine, Birame Ndour. À l’en croire, la maturité d’un mois entrait dans le cadre de la phase pilote. « Le délai de remboursement étalé sur trois moins sera bientôt en vigueur. En plus, nous allons digitaliser les procédures en effectuant les opérations à travers les opérateurs de transfert d’argent », a-t-il informé. D’après lui, en une année d’intervention, le point nano crédit a injecté 1 015 475 000 FCfa au profit de 1367 femmes, avec un taux de remboursement de près de 99 %.

D. DIENG 

ABOU MBAYE, DIRECTEUR DU MARCHÉ AU POISSON DE PIKINE

« Le nano crédit est ma satisfaction » 

Pour le Directeur général du Marché central au poisson de Pikine, Abou Mbaye, le nano crédit est l’une de ses plus grandes fiertés. Selon lui, il soulage les femmes et permet le développement de leurs activités économiques. « Le nano crédit est ma satisfaction. Cette idée que j’ai mûrie avec la Der/Fj (Délégation à l’entreprenariat rapide des femmes et des jeunes), fournit un accompagnement de qualité aux femmes et met fin à l’esclavage financier dont elles étaient victimes », se réjouit-il.

(LESOLEIL)

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