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«Il faut une gestion inclusive…..des déchets», Madany Sy, Sg Syndicat national des travailleurs du nettoiement

Le Sénégal est toujours à la recherche de la bonne formule pour la collecte et la gestion des ordures, depuis des décennies. De la SIAS à l’UCG, en passant par la Société Industrielle d’aménagement urbain du Sénégal (SIAS), AMA-Sénégal, Veolia-Sénégal, l’Agence pour la propreté de Dakar (puis du Sénégal – APRODAK devenue APROSEN), l’entente CADAK-CAR, plusieurs structures, sociétés concessionnaires et programmes mis en place pour un «Sénégal propre» ont été «souillés» et inondés par les milliers de tonnes d’ordures produite dans la capitale et le reste du pays. Face au mal de l’insalubrité qui semble s’enraciner, surtout dans Dakar, notamment la banlieue, et les grandes villes intérieures, le gouvernement prépare un nouveau plan-remède. Le Conseil des ministres du mercredi 16 mars 2022 a examiné et adopté le projet de loi portant création de la Société nationale de gestion intégrée des déchets (SONAGID). Une nouvelle structure qui viendra enterrer l’Unité de coordination de la gestion des déchets solides (UCG) qui, en plus de Dakar, est désormais présente dans les régions du Sénégal. Cette trouvaille est-elle la solution ? Les acteurs notamment les travailleurs du nettoiement ont-ils été associés à son élaboration ? Quelles solutions durables pour le ramassage, le transport et la gestion durable des ordures ? Madany Sy, le secrétaire général du Syndicat national des travailleurs du nettoiement répond à ses questions.

 

Le Conseil des ministres de mercredi dernier a examiné et adopté le projet de loi portant création de la Société nationale de gestion intégrée des déchets (SONAGID). Quelle appréciation en faite vous ?

Par rapport à la création de la SONAGID, c’est-à-dire la Société nationale de gestion intégrée des déchets, dont le projet de loi a été adoptée en Conseil des ministres par l’Etat du Sénégal, pour nous c’est une très bonne chose dans la mesure où, aujourd’hui, l’UCG, non seulement n’a pas les moyens de sa politique, mais a un problème de cadre juridique légal. Et depuis lors, en tant que représentant des travailleurs, nous ne cessions vraiment d’insister pour que l’UCG change de statut afin que la situation des travailleurs puisse être réglée définitivement. Parce qu’on ne peut pas comprendre qu’une Convention collective propre au secteur du nettoiement soit signée, depuis 2015, l’une des meilleures Conventions collectives du Sénégal, et qu’elle ne soit toujours pas appliquée. Pour nous, c’est une hérésie.

L’autre aspect, c’est que cette société nationale, quand elle sera créée ? Qu’apportera-elle aux travailleurs, s’ils sont contactés ? Au moment où on vous parle, nous n’avons aucune idée de cette société nationale, même si, auparavant, nous en avions eu écho. Nous ne connaissons ni les tenants ni les aboutissants. Nous ne connaissons pas les statut et règlement et nous attendons d’être conviés… parce que, je le dis tout le temps, Ulrich dit que «tout ce qui est fait pour toi, sans toi, est fait contre toi».

Donc, il faut aussi que les travailleurs sachent à quoi s’en tenir et qu’on sache aussi à quelle sauce nous allons être mangés. Quelle sera la part des travailleurs ? Là aussi nous attendons les autorités puisque nous sommes les maillons le plus essentiels du dispositif. Et tout le monde a constaté une précarité extrême chez les travailleurs du nettoiement, puisqu’à l’UCG, nous avons presque trois types de travailleurs. Nous avons des agents permanents qui ont des contrats à durée indéterminée, des journaliers qui sont là depuis presque plus de 10 ans sans être régularisés (il y a plus de 3000 journaliers qui sont là) et aussi ceux qu’on appelle les VP, les volontaires de la propreté. Il y a aussi le programme «Xëyu Ndaw ñi» qui est différent, puisque ce programme a été initié par le président de la République. L’Etat du Sénégal a octroyé 10.000 emplois sur toute l’étendue du Sénégal. Donc, ces gens aussi sont payés par l’Etat du Sénégal. Ils ont des contrats tests révocables à tout moment.

Vous n’avez pas encore été associé à la création de cette nouvelle société. Qu’attendez-vous du gouvernement concernant la SONAGID ?

Par rapport à toutes ces informations, nous attendons d’être conviés, d’être associés. Au cas contraire, nous sommes des syndicats légalement constitués, puisque nous avons sept (7) syndicats à l’UCG. Donc, ce projet de loi, pour nous, il est important aujourd’hui de réguler le secteur, de prendre en charge les préoccupations de travailleurs, surtout par rapport au statut du travailleur du nettoiement, puisque nous avons l’impression que le capital humain est relégué au second plan. Or, le capital humain est un levier au processus de développement.

On parle aujourd’hui de «Sénégal zéro déchet». Cela ne pourra pas se faire sans l’accompagnement des travailleurs, sans prendre en compte les préoccupations des travailleurs que nous sommes. Sur le plan salarial, sur le plan des équipements de protection individuelle et surtout sur la prise en charge de leur plan de carrière. Donc nous attendons en tout cas d’être édifiés par rapport à cette nouvelle société. Nous pensons qu’aujourd’hui la SONAGID ne sera pas comme les autres sociétés mort-nées, puisqu’il y a eu souvent des effets d’annonces… Nous pensons, pour cette fois-ci, que les préoccupations des travailleurs en tout cas seront prises en compte pour un apaisement du climat social. Sans cela, nous sommes à haute intensité de mains d’œuvres.

Au moment où je vous parle, nous n’avons pas encore été conviés à cette nouvelle société. Nous n’avons pas été associés en amont et en aval. Il n’y a pas encore une réunion officielle par rapport à cette nouvelle société. Le ministre Abdoulaye Seydou Sow (en charge l’Urbanisme et l’Hygiène publique) nous avait dit, en tout cas, qu’il est même prêt à partager les statuts et règlements pour qu’on sache maintenant à quoi s’en tenir. «En tout cas, soyez rassuré par rapport à cette nouvelle société», avait-il dit. Pour nous, il faut aujourd’hui régler le cadre juridique légal puisque l’UCG non seulement ne peut pas embaucher les travailleurs mais l’UCG est dans une situation difficile, très précaire et a un problème de cadre juridique légal.

Entre l’adoption en Conseil des ministres et le vote par l’Assemblé nationale suivi de la promulgation, n’est-ce pas là tout un processus pour rectifier le tir ?

Ce projet de loi a été adopté en Conseil des ministres ; il faudrait qu’il passe au niveau de l’Assemblée nationale pour être examiné et voté, avant sa promulgation par le président de la République. Donc c’est un processus qui est là, qu’on doit respecter. Mais, en tout cas, nous attendons d’être associé. Il faut qu’on n’associe les parts des nouveaux travailleurs dans cette société. Là aussi, c’est des questions qu’on se pose. Nous sommes à l’affût, nous attendons. Et quelques soient les cas de figure, si les préoccupations des travailleurs ne sont pas prises en compte, nous sommes des syndicats légalement constitués et nous sommes également dans un Etat de droit et il faut que force reste à la loi.

De la SIAS à l’UCG, plusieurs structures ont été mises en place ; mais l’insalubrité persiste encore, surtout à Dakar. Quelles solutions durables préconisez-vous en tant qu’acteurs de terrain ?

Effectivement plusieurs sociétés se sont succédé et c’est un éternel recommencement. Donc nous pensons que pour une meilleure gestion des déchets, il faut un cadre juridique légal, que les structures aujourd’hui qui sont là puissent nous permettre en tout cas d’avoir les moyens de leurs politiques. Et depuis un certain temps, nous avons constaté qu’il y a un léger mieux, avec l’arrivée du nouveau coordinateur de l’UCG. Depuis deux (2) ans, trois (3) ans maintenant, nous avons constaté qu’il y a des améliorations à Dakar et au niveau des capitales régionales. Vous avez constaté qu’il y a un look mobilier urbain partout. Il y a la création… des points de regroupement normalisés, il y a «allo déchet», «allo gravats». Il y a une ruée dans se secteur, avec surtout des jeunes, des étudiants et partout aujourd’hui la demande est supérieure à l’offre.

Aussi le programme «Xëyu Ndaw ñi» est venu renforcer la dynamique unitaire parce que, dans les régions, il n’y avait absolument rien. Mais tout le monde a constaté aujourd’hui un maillage territorial. Il faut que les moyens puissent être renforcés davantage pour une meilleure gestion des déchets. Tout récemment, l’Etat du Sénégal a créé ce qu’on appelle le PROMOGED c’est-à-dire une société qui va être chargée de la valorisation des déchets, avec la création des infrastructures qui vont répondre aux normes environnementales. Si je prends l’exemple de la décharge de Mbebeuss, elle va être réhabilitée, donc restructurée. Aujourd’hui, il y aura encore plus de Cent-cinq-quatre (154) communes qui vont être impactées par le PROMOGED ; c’est un financement presque de deux-cent-dix (206) milliards que l’Etat et les partenaires ont voulu mettre en exergue.

Pour la création des infrastructures de haut niveau des communes, et tout le monde sait que le nettoiement est une compétence transféré aux collectivités territoriales ; mais, malheureusement, ces collectivités sont dépourvues de moyens. Et nous pensons que, pour une gestion durable des déchets, il faut une gestion inclusive, participative et globale avec des moyens humains, des moyens matériels mais surtout des moyens financiers et des stratégies à court, moyen et long termes qui vont nous permettre en tout cas de faire un maillage nationale et d’avoir aujourd’hui des moyens politiques pour permettre à la population de ne pas cohabiter avec la saleté. Mais aussi, avoir des infrastructures qui répondent aux normes environnementales.

(SUDQUOTIDIEN)

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