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Etude sur les défis sécuritaires : Pourquoi le cas de Kedougou inquiète

 

Dans le cadre de sa tournée économique, le chef de l’État, Macky Sall, est attendu ce lundi à Kedougou, l’une des régions les plus pauvres du Sénégal. Un grand paradoxe pour cette partie du territoire national qui dispose d’atouts majeurs et de ressources énormes. Mais c’est aussi une région de frontières, qui présente un enjeu sécuritaire de taille dans le contexte tendu de la sous-région. Décryptage avec les données de l’Agence nationale de Statistiques et de Démographie (ANSD) et les éclairages de Docteur Bakary Sambe.

L’alerte est sonnée. Il urge de préserver le vivre ensemble, la cohésion sociale et ce, surtout dans des zones vulnérables, comme les régions frontalières. Le cas de Kédougou se pose avec acuité, d’après les résultats de l’étude menée par l’équipe de Timbuktu Institute et intitulée : “défis transnationaux et sécuritaires, aux frontières Guinée-Mali-Sénégal : entre vulnérabilités et résilience”.

Parmi les facteurs composant ce “cocktail explosif”, celui lié à la frustration grandissante des jeunes a retenu l’attention des enquêteurs. Ce qui constitue, d’après le directeur de Timbuktu Institute, Dr Bakary Sambe, “une préoccupation majeure”. En effet, insiste-t-il, “les jeunes de Kédougou sont assis sur de l’or et les populations n’en profitent pas”.

Cette affirmation émise dans le contexte de la mort du jeune orpailleur Yamadou Sagna, lors d’un accrochage avec les éléments de la Douane en 2017, résume la précarité de la situation, précise le rapport. Le document donne l’exemple du secteur minier comme “le plus palpable pour exprimer les contrastes existant sur le plan économique.”

TAUX DE CHÔMAGE EXTRÊME

Ainsi, “l’or qui est exploité dans sa forme industrielle ou traditionnellement dans les sites d’orpaillage dits ’’Dioura’’, constitue un secteur névralgique de l’économie de Kedougou en particulier et de celle du Sénégal en général. Rien que son mode d’exploitation industrielle occupe la deuxième place des exportations du Sénégal. Entre 2009 et 2014, ce secteur a connu une hausse de près du double, passant de 85 milliards et 403 millions F CFA à 170 milliards et 744 millions F CFA.”.

Curieusement, le rapport de l’ANSD sur la situation économique et sociale du Sénégal de 2015 place la région à la tête des régions les plus touchées par le chômage avec 26.3% et où le taux de pauvreté reste exponentiellement élevé (71%). Pourtant, 67.7% de l’échantillon pensent que la région est riche.

En termes de réponses, l’État est invité, en plus des initiatives traditionnelles comme le Programme d’Urgence de Modernisation des Axes et Territoires Frontaliers (PUMA) et le Programme d’urgence de développement communautaire (PUDC), moyennement appréciés, à redoubler d’efforts face à la préoccupation de l’absence de main d’œuvre mise en avant par les sociétés minières. Une des raisons mises en avant, concernant ce point, est “le décrochage scolaire qui aurait atteint des proportions inquiétantes”, selon l’étude. Ajoutant que les difficultés auxquelles font face les jeunes sont la pauvreté (55%), le chômage (43.5%). Des facteurs de risques désignés principalement par les personnes interrogées sur la question ’’qu’est-ce qui pourrait expliquer un jour qu’un jeune ou une femme intègre les rangs d’un groupe armé ou terroriste ?’’ : la pauvreté (35.1%), le chômage (30.3%).

FAIRE BÉNÉFICIER AUX POPULATIONS DES RETOMBÉES DES RICHESSES

Sur ces maux, l’État (40.2%) et les autorités locales (31.7%) sont fortement interpellés par les répondants qui indexent également les sociétés d’exploitation leur demandant “de faire bénéficier les populations des retombées des richesses malgré l’existence d’un fonds social minier censé participer à la réalisation de certaines infrastructures sociales de bases.” Une agriculture “plus mécanisée et motorisée” est également réclamée dans une zone où il pleut six mois sur douze. “L’État répressif est parfois très présent et l’État protecteur et fournisseur de services beaucoup moins”, a regretté Dr Sambe.

Les recommandations vont dans le sens “de co-constructions des solutions entre d’une part l’État comme acteur principal, les forces de défense et de sécurité, qui en sont un démembrement, l’administration territoriale mais aussi les populations locales au sein desquelles il y a les leaders religieux, traditionnels, les femmes, et les jeunes”, entre autres.

Par ailleurs, “il faudra redoubler d’efforts et de vigilance dans cette zone pour que cette résilience du Sénégal puisse être préservée et que le Sénégal puisse demeurer cet îlot de stabilité dans l’océan d’insécurité et d’instabilité régionale surtout face aux défis sécuritaires connus au Mali et dans d’autres pays voisins”, a ajouté le chercheur sénégalais.

(EMEDIA)

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