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Compagnie aérienne nationale : Encore des ambitions à consolider

Mamadou Lamine Sow

Cadre Transport aérien

lamine.iero@gmail.com

 

Le dernier en date, c’est le quotidien « Enquête » du jeudi 12 août 2021 qui présente à sa Une : « la compagnie est sur une mauvaise pente et n’en finit pas de fâcher certains de ses clients à cause des retards, on lui reproche un déficit de personnels qualifiés et des problèmes dans le management. Des difficultés à juguler avant que les clients ne boudent ».

De plus en plus de voix s’élèvent et souvent relayées par la presse nationale et internationale pour dénoncer la non-qualité des services offerts par la compagnie nationale notre compagnie, alors que sa mission première est de répondre voire dépasser les attentes de ses clients, de son personnel et de son actionnaire, le Contribuable sénégalais.

Une situation embarrassante pour tous, car des montants importants sont investis au titre du financement de son Capital social, de l’acquisition de ses appareils de dernière génération, mais aussi du renforcement de son bilan face à la pandémie.

Avoir la réputation d’être incapable de tenir la régularité de ses vols, de ses horaires et les réservations qu’on pouvait faire, considérées comme aléatoires, reste une complainte de taille et un handicap sévère pour cet actif de souveraineté nationale.

La récurrence de ces réclamations étayées à haute et intelligible voix sont sources de vulnérabilité face à la concurrence et à ses ambitions.

Il ne se passe plus de semaines sans que les complaintes ne se succèdent pour évoquer le mécontentement d’une clientèle qui crie son désarroi devant un service offert non conforme à ses attentes. Il est peut-être temps d’infléchir cette trajectoire.

Une absence de réaction pourrait avoir de conséquences dommageables pour tous. La restauration d’un climat de confiance s’impose.

Un billet d’avion physique ou électronique représente le contrat de transport qui matérialise la relation marchande entre voyageur et transporteur à travers son programme d’exploitation. Il s’agit du produit vendu aux clients : des vols réguliers et ponctuels et un service de qualité tourné entièrement vers la satisfaction du client. Le programme d’exploitation appartient à toute la compagnie et constitue le socle du cœur de métier de l’entreprise.

Cependant, le programme d’exploitation publié et vendu à la clientèle peut, en cours d’exécution subir des modifications du fait des irrégularités d’exploitation, IRGAV (avion), IRGIT (itinéraire), IRGTU (horaire), et IRGEQ (équipage).

Dans ces conditions, la situation doit être appréhendée, analysée et traitée avec professionnalisme. L’amateurisme ne doit pas prendre le pas sur le professionnalisme.

Dans le métier de transporteur aérien, l’anticipation est primordiale et l’observation de certains principes directeurs est une garantie qui permet d’éviter bien des risques et aléas d’exploitation : mener les opérations que l’on peut et sait faire à l’échelon national avant de les faire à l’international ; s’assurer de la rentabilité des lignes avant leur mise en service ; réduire la voilure en cas de récession et la redéployer quand la croissance repart ; être agile et capable de réagir rapidement dans son environnement ; être capable de maintenir sa performance au niveau requis par la concurrence ; considérer que chaque vol réussi est un point supplémentaire dans la satisfaction du client et ainsi, dans sa fidélisation ; donner de la fierté à ses salariés à travers ses opérations ; savoir et pouvoir jouer avec les mêmes règles du jeu et les mêmes cartes que ses concurrents etc. …. Parce que désormais, le client consommateur est libre de ses choix, alors, seule la compétitivité qui résulte de l’amélioration du cout et de la qualité de l’offre reste la parade.

La vision « d’être un jour l’alter ego de Ethiopian » est méritoire, il faut s’en donner les moyens, pas seulement financiers, il faut une dose de professionnalisme pour garantir cet objectif.

Eu égard aux sacrifices consentis grâce à un vaste soutien financier, politique et technique de l’État donc du contribuable et à l’appui des populations à travers un patriotisme positif contre les sceptiques qui voient les priorités ailleurs, l’autorité ne peut et ne doit rester insensible à pareille situation : ces aides publiques consenties ne peuvent se justifier que dans des circonstances très exceptionnelles (covid-19) et à titre transitoire. Une compagnie aérienne ne doit pas vivre que grâce aux aides publiques. L’aide publique doit être justifiée par la mise en œuvre d’un véritable plan de restructuration et ne pas être accordée pour couvrir des pertes d’exploitation.

Il est dès lors, un devoir moral et citoyen pour la compagnie de ne pas ruiner tous ces efforts et toutes ces espérances placées en elle.

Les irrégularités opérationnelles sont d’origines diverses. Elles dépendent de la nature des problèmes à résoudre et qui tient souvent au fait des Capitaux mobilisés :

Les compagnies sont de petites tailles ; elles n’ont pas assez d’avions et donc vivent des tensions sur la flotte. Dès qu’il y a un incident technique qui fait qu’un avion doit être d’urgence mis en entretien, donc en dehors des révisions périodiques programmées, il y’a des vols qui sont retardés, décalés voire annulés.

L’autre problème est celui du renouvellement et de la modernisation de la flotte. Les avions coûtent très chers. Il faut, pour pouvoir survivre, avoir la possibilité de renouveler la totalité de sa flotte et l’adapter au réseau. Cela représente des investissements importants.

Une autre chose qui ne relève pas de la responsabilité des compagnies, c’est l’évolution de notre espace régional. L’intégration africaine prônée par nos chefs d’État, est primordiale pour la survie des compagnies nationales.

Par ailleurs, dans un marché où le nombre d’opérateurs n’a pas diminué, augmenter ses parts ou son trafic, suppose, ou des sacrifices sur les tarifs au détriment de la recette totale, ou une amélioration considérable de la qualité des services pour lesquels, davantage de progrès restent encore à accomplir.

Et enfin, si la conjoncture économique et sanitaire (covid-19) perdure dans un marché qui se contracte, la situation devient encore plus difficile, avec un impact global, pas seulement sur notre compagnie.

En tout état de cause, restaurer la confiance reste un impératif catégorique !

Plus de professionnalisme et moins d’amateurisme : C’est faire de ses personnels des ambassadeurs, une vitrine de notre pays, un reflet sincère de sa beauté, de son hospitalité, de sa culture mais aussi de sa stabilité économique, politique, sociale et environnementale ; C’est faire de ses clients, des voyageurs privilégiés, empressés de renouveler leur expérience de voyage ; C’est faire du contribuable sénégalais, un actionnaire fier de son patrimoine.

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