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Gestion transparente des fonds destinés à la covid-19 : Le cas du Sénégal

Le Sénégal a célébré, hier, la 6e édition de la Journée africaine de lutte contre la corruption, placée, cette année, sous le thème ‘’Stratégies et mécanismes de gestion transparente des fonds destinés à la Covid-19’’. 

L’Office national de lutte contre la fraude et la corruption (Ofnac) a commémoré, pour la sixième fois consécutive, la Journée africaine de lutte contre la corruption. Le thème de cette année est ‘’Stratégies et mécanismes de gestion transparente des fonds destinés à la Covid-19’’. Il a été choisi par  l’Union africaine qui offre ainsi en exemple l’expérience sénégalaise dans la gestion de ce fonds.

En effet, la Covid-19 est apparue sur le territoire national sénégalais le 2 mars 2020. Elle a été déclarée pandémie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) le 11 mars de la même année. Une pandémie de cette ampleur a provoqué non seulement des dépenses imprévues, mais a eu aussi des effets macroéconomiques importants.

Afin de lutter contre la maladie et surtout contenir sa propagation, l’État du Sénégal a pris des mesures fortes d’endiguement qui se sont traduites par des restrictions de libertés publiques et de limitations des activités économiques et sociales. Cela s’est matérialisé par la mise en place du Programme de résilience économique et sociale (Pres), marqueur de la gestion de la pandémie, doté d’un fonds de mille milliards de francs CFA, représentant environ 7 % du PIB, afin de renforcer le système de santé et de soutenir les ménages, la diaspora sénégalaise, ainsi que les entreprises et leurs salariés.

 ‘’Le comité de suivi a organisé des réunions de travail, effectué des visites de terrain, conduit des interviews des principaux acteurs et mis en place une plateforme numérique de suivi des données transmises par les organismes d’exécution. Les points focaux désignés dans tous les ministères comme interlocuteurs ont également permis d’avoir accès aux informations requises dans les délais’’, a indiqué le ministère des Finances et du Budget.

Les services d’Abdoulaye Daouda Diallo relèvent qu’un plan de travail a été élaboré, assorti de tâches à exécuter et leurs échéances clairement identifiées. Il faut dire que le suivi est un processus continu qui consiste à surveiller le déroulement d’un programme, projet ou politique et qui s’appuie sur les données collectées pour améliorer la mise en œuvre du programme, projet ou politique, sa gestion et les décisions quotidiennes le concernant.

Ainsi, selon le ministère des Finances et du Budget, la méthodologie adoptée qui sous-tend la conception dudit plan, se résume comme suit : suivi in situ et de visu assorti de présentation des pièces justificatives.

Il est important de noter que pour des raisons de plus grande célérité, les dépenses du Force-Covid-19 ont bénéficié du régime dérogatoire. Le cadre réglementaire a été allégé à travers le décret n°2020-781 du 18 mars 2020 portant dérogation à l’application du décret n°2014-1212 du 22 septembre 2014, portant dérogation au Code des marchés publics, modifié par le décret n°2020 22 du 7 janvier 2020. Partant de ce fait, par dérogation aux dispositions du règlement général sur la Comptabilité publique, les opérations du Force-Covid-19 ont été dispensées de tout contrôle administratif a priori et de tout visa préalable. Ces mesures ont pour corollaire un contrôle à postériori des opérations pour s’assurer de leur efficacité et de leur efficience.

Création d’un compte de dépôt au Trésor pour la gestion des fonds

Pour la gestion des fonds, il a été créé un compte de dépôt au niveau du Trésor public, géré au sein du ministre des Finances et du Budget. L’ensemble des transactions concernant ce fonds ont été retracées dans les écritures comptables.

En outre, selon nos informations, dans le cadre de la riposte, les ministères ont pu exécuter des dépenses à partir de leurs ressources budgétaires propres. À cet effet, un module dédié a été conçu dans la plateforme de gestion financière de l’État (SYSBUDGEP) pour assurer la traçabilité des dépenses Covid de chaque département ministériel et permettre aux différents acteurs de la chaine de dépense de céder aux vérifications en conformité à la réglementation en vigueur.

‘’À la date du 31 mars 2021, le Pres affiche un taux d’exécution supérieur à 70 %. Ce qui est appréciable au regard du contexte. Les ressources mobilisées s’élèvent à 773,214 milliards F CFA et les montants décaissés à 740 milliards 090 millions 570 mille 784 F CFA. Dès lors, les ressources mobilisées couvrent les montants des dépenses décaissables’’, ont salué les services d’Abdoulaye Daouda Diallo. A cela s’ajoutent les mesures fiscales et douanières d’un montant de 371,6 milliards F CFA et une opération de trésorerie, en fonds de garantie, pour 70 milliards F CFA.

Legs Africa : ‘’Une gestion politisée des fonds’’

Cependant, l’étude menée par Legs Africa révèle, entre autres, ‘’une gestion politisée des fonds Covid-19’’. Selon Dieynaba Kane, les populations ont relevé des problèmes de transparence et des inégalités dans la gestion de ces fonds. ‘’Le soutien et la protection sociale aux familles vulnérables sont ainsi jugés limités. L’analyse qualitative révèle une insatisfaction chez beaucoup de personnes pour des raisons d’appartenance politique’’, dit-elle. La redevabilité constitue une demande sociale, dès lors que les populations dénoncent des problèmes d’équité dans la distribution des fonds Covid-19 et laissent transparaître des frustrations sociales. ‘’Il ne voulait pas que je sache ce qu’ils font. J’ai constaté qu’un délégué de quartier n’a donné les vivres qu’à ses proches et parents… Je recommande à l’État un audit profond pour éclairer la population sur comment ils ont utilisé l’argent du contribuable’’, dit un informateur.

Ainsi, les actions associées à la redevabilité sont accompagnées de dynamiques d’exclusion sociale de certaines couches qui posent un problème d’équité et de transparence, avec le faible niveau d’implication des communautés dans ce processus. Pour Dieynaba Kane, ces mesures exhortent à  publier les contrats d’achat liés à la Covid-19 supérieurs à une certaine valeur minimale ; publier les noms et la propriété effective des sociétés auxquelles des marchés ont été attribués ; procéder à des audits internes plus fréquents, etc.

Pour sa part, la présidente de l’Ofnac, Seynabou Ndiaye Diakhaté, note qu’avec l’avènement de la pandémie de Covid-19 qui a durement impacté nos économies et qui continue encore de frapper nos pays, ‘’l’Afrique est entrée dans un cycle tumultueux qui risque, si l’on n’y prend pas garde, d’accentuer les graves problèmes de gouvernance qui sont relevés depuis bien longtemps’’.

‘’En effet, la Covid-19 a mis en lumière et exacerbé les difficultés d’ordre économique et social de l’Afrique. Aussi, la situation actuelle est-elle le signe d’alarme pour intensifier nos efforts dans la lutte contre la corruption. Il y va du développement humain intégral de nos citoyens, de nos populations et, au-delà, il y va de la stabilité de nos États’’.

La Journée africaine de lutte contre la corruption est commémorée, à travers tout le continent, à la date du 11 juillet qui marque le jour où l’Union africaine (UA) a adopté, en 2003 à Maputo, la Convention de l’Union africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption (CUAPC) ratifiée par la suite par le Sénégal, le 15 février 2007. Au-delà de sa portée symbolique, cette journée constitue une occasion importante pour mobiliser tous les acteurs du continent contre ce fléau qui gangrène les sociétés et empêche l’émergence de nos États.

Pour l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption (Ofnac), cette commémoration est une opportunité pour analyser les défis liés à la lutte contre la corruption qui étale ses tentacules dans toutes les sphères de notre société.

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