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Covid : « on ne peut nous obliger à plafonner à 4% de déficit quand des pays comme la France sont à 8% » (A. Ouattara)

 Alors que la covid-19 a exacerbé leurs besoins, les pays africains essayent d’obtenir des aides financières extérieures grâce au FMI. Dans un plaidoyer, le président Alassane Ouattara a appelé le Fonds à être plus flexible envers les économies africaines, pour leur permettre de relever leurs défis.

Lundi 10 mai 2021, le président ivoirien Alassane Ouattara (photo) était l’invité d’un débat virtuel organisé à l’occasion du 60e anniversaire du département Afrique du Fonds monétaire international (FMI). Lors de son intervention, l’ancien fonctionnaire de l’institution de Bretton Woods s’est livré à un véritable plaidoyer pour sa réforme en profondeur, et une amélioration des mesures prises pour aider les pays africains à se sortir de la crise de la covid-19.


D’après le chef d’Etat ivoirien, il est crucial que les pays africains disposent de l’espace fiscal nécessaire pour financer leurs processus de reprise économique. Dans cet ordre d’idées, il demande au FMI de faire preuve de souplesse concernant le taux de déficit public exigé aux Etats africains qui souhaitent bénéficier d’un financement de l’institution.

« Lorsqu’on regarde le ratio déficit/PIB, c’est 9% aux USA et près de 8% en France. L’Allemagne qui a toujours été un pays excédentaire va cette année enregistrer un déficit de 6%. Pourtant, dans le cadre de nos échanges, on parle d’un déficit de 4% pour les pays africains. C’est impossible », a déclaré le président ivoirien. Et d’ajouter : « Si le FMI continue à faire preuve de rigidité sur les questions de déficit pour les pays pauvres durant cette période de pandémie, je suis désolé madame Georgieva [directrice du FMI, Ndlr] mais vous aurez des problèmes avec tous les pays. Nous ne pouvons pas accepter que la France par exemple ait un déficit de 8% et que la Côte d’Ivoire soit obligée d’avoir un déficit de 4%. Ce n’est pas viable ».

Même si les discussions pour une émission en grandes quantités de droits de tirage spéciaux (DTS) du FMI en faveur des pays africains semblent rencontrer l’assentiment de plusieurs pays riches, le dirigeant indique que ces mesures prises isolément ne régleront pas le problème des économies africaines. D’après le président Ouattara, une plus grande marge de manœuvre des pays du continent sur le plan de leurs déficits budgétaires leur permettra de faire face aux besoins colossaux qu’a engendrés la pandémie de covid-19, qui se sont ajoutés aux défis déjà importants du terrorisme et du sous-développement.

Rien qu’en Afrique subsaharienne, le FMI estime le montant des financements nécessaires pour accroître les dépenses de lutte contre la pandémie et le terrorisme tout en maintenant des réserves suffisantes et en accélérant la reprise économique à environ 425 milliards $ sur les cinq prochaines années. Un besoin que ne suffiront pas non plus à combler les efforts de mobilisation de recettes intérieures des pays africains.

Pour faire face à ces besoins, Alassane Ouattara demande au FMI de créer un cadre favorable à une meilleure entraide entre les pays développés et les moins avancés. « Les pays du G7 et du G20 doivent faire preuve de solidarité. Je pense qu’ils sont égoïstes », a-t-il déclaré. « Il y a un manque de solidarité de la part de la plupart de ces pays. C’est ce manque de solidarité qui est responsable de certains des problèmes que ces pays connaissent aujourd’hui comme celui des migrations », a-t-il ajouté, appelant les plus riches à aider les plus pauvres.

Une meilleure représentativité

Au-delà de la solidarité entre riches et pauvres, le dirigeant a plaidé pour une réforme en profondeur du FMI qu’il appelle à s’adapter à son temps. « En tant que chef d’Etat et homme politique, j’estime qu’il y a un problème structurel. Il porte sur l’organisation du monde après la Deuxième Guerre mondiale. A mon avis il y a de profonds problèmes structurels qui n’ont pas été résolus. Je crois que cette institution est simplement dépassée », a indiqué l’ancien directeur Afrique du FMI.

Plus précisément, il souhaite une meilleure représentativité de l’Afrique, notamment de l’Afrique subsaharienne qu’il estime lésée dans le processus décisionnel du FMI. « L’on ne peut admettre que l’Afrique qui représente 54 pays n’ait que 7% des quotes-parts […]. Cela doit changer parce que c’est injuste et obsolète », a déclaré le chef d’Etat qui appelle également à une mise à jour du consensus de Washington ; cet ensemble de principes qui guide les mesures de relance économique des institutions de Bretton Woods.

(AGENCE ECOFIN)

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